HILL, THOMAS, journaliste, auteur dramatique et éditeur, né le 13 juin 1807 en Cornouailles, Angleterre ; décédé le 13 octobre 1860 à Fredericton.

Tout ce que l’on connaît de la jeunesse de Thomas Hill vient de son témoignage au cours d’un procès en diffamation qu’il intenta en 1858. Il déclara alors être venu à Montréal en 1831, mais avoir quitté cette ville peu après pour aller habiter temporairement Grand Falls, au Nouveau-Brunswick, avant d’aller s’établir dans le Maine. Il avait occupé différents emplois à cette époque, entre autres ceux de menuisier et de musicien. Toujours selon son témoignage, il s’était marié et avait eu trois enfants, puis était allé s’établir une seconde fois au Nouveau-Brunswick, à Woodstock, à la fin des années 1830, laissant sa famille derrière lui. Selon certains, Hill se serait enrôlé dans l’armée pendant qu’il vivait aux États-Unis et aurait déserté par la suite. En fait, c’est parce qu’il fut accusé de désertion dans une lettre publiée le 12 mars 1858 dans le New Brunswick Reporter and Fredericton Advertiser, journal de James Hogg*, qu’il intenta des poursuites en diffamation. Bien que Hill ait prétendu qu’il avait été un civil qui s’était si fortement opposé à la position américaine dans la « guerre de l’Aroostook » [V. sir John Harvey] qu’il avait quitté de son plein gré les États-Unis, la cour se prononça en faveur de Hogg.

En 1842, Hill, s’étant associé à l’imprimeur James Doak, était devenu rédacteur en chef de l’hebdomadaire de Saint-Jean, le Loyalist. Au cours des dix années suivantes, ce journal, qui se rangea sous plusieurs bannières, s’établit à Fredericton pendant environ trois ans, avant de revenir à Saint-Jean. Le 25 mai 1844, Hill fit une déclaration de principes dans laquelle il plaidait en faveur d’un conservatisme qui sauvegarderait la constitution britannique et la monarchie héréditaire, et dans laquelle il s’opposait au radicalisme et au républicanisme. Sous la direction de Hill, le Loyalist se révéla carrément un défenseur du lien avec l’Empire ainsi que de l’orangisme, et un adversaire du gouvernement responsable.

Deux éditoriaux de Hill sur le débat à la chambre d’Assemblée au sujet du gouvernement responsable parurent dans le Loyalist le 23 février 1844. Le premier mettait en doute la loyauté des députés qui s’étaient prononcés en faveur de ce type de gouvernement, et le second s’attaquait directement à l’un des leaders de ce mouvement, Lemuel Allan Wilmot*, dans les termes suivants : « Laissez [les députés] lors de la prochaine élection dire au chien de meute qui a servilement gagné leur confiance, pour ensuite mordre la main qui les a nourris, qu’ils n’ont plus besoin de ses services – qu’étant eux-mêmes loyaux, ils ne seront plus représentés par un rebelle et par un lâche, et qu’ils le renvoient au chenil d’où il est venu empoisonner de son haleine fétide l’air du Nouveau-Brunswick. » Hill et Doak firent parvenir des exemplaires du journal à la chambre d’Assemblée pour qu’ils soient déposés sur les pupitres des députés, qui furent scandalisés à la lecture de ces éditoriaux. Dans une motion présentée le 26 février et qui utilisait l’épithète « diffamatoire », les membres sommèrent Hill et Doak de comparaître à la barre de la chambre afin de rendre compte de leurs écrits. Les députés décidèrent d’emprisonner « jusqu’à révocation » les deux associés en ayant recours à un mandat du président, et ceux-ci ne furent libérés qu’au bout d’une semaine grâce à une ordonnance d’habeas corpus signée par le juge James Carter*.

Doak et Hill retournèrent immédiatement dans les galeries de la chambre, geste qui irrita les députés. Réagissant à la mise en liberté des deux hommes, le comité des privilèges de la chambre se réunit aussitôt, mais le Loyalist n’en continua pas moins ses attaques dans le numéro suivant. Le 26 mars, le comité publia un rapport dans lequel il réaffirmait le droit de l’Assemblée d’écrouer ceux qui se rendaient responsables d’un outrage aussi flagrant. Toutefois, il ne donna pas d’autre suite à cette affaire. Entre-temps, Hill et Doak avaient entrepris des poursuites judiciaires contre le président de l’Assemblée, John Wesley Weldon, et le sergent d’armes, George Gardner, pour emprisonnement injustifié. Lors d’un jugement par jury le 16 octobre 1845, le verdict fut rendu en faveur de Hill et de Doak à qui l’on accorda des dommages-intérêts de plus de £220. La Cour suprême confirma la décision du tribunal, déclarant que la chambre d’Assemblée avait outrepassé ses pouvoirs. En fait, grâce aux efforts de Hill et de Doak, la liberté de la presse vis-à-vis du Parlement fut établie au Nouveau-Brunswick.

Les rapports entre Hill et Doak connurent des heures difficiles. En février 1845, Hill, supposément en état d’ébriété, s’introduisit par effraction dans la maison de Doak « avec toute la férocité d’un sauvage » et battit son associé jusqu’à ce qu’il n’en puisse plus. Leur association prit fin le 25 février, mais il semble que tout ait été pardonné, et, en juillet 1846, Hill et Doak s’associaient de nouveau.

Les intérêts de Hill en matière de publication ne se bornèrent pas au Loyalist. En septembre 1842, à Saint-Jean, il avait lancé l’Aurora, journal qui devait paraître trois fois par semaine, mais qui s’éteignit après le premier numéro. Trois ans plus tard, Doak et lui fondèrent à Fredericton le Wreath qui, lui aussi, ne parut qu’une fois. En 1846, ils projetaient de lancer une publication pour enfants, le Young Aspirant, mais finalement c’est Hogg qui en fut l’éditeur. De retour à Saint-Jean, Hill participa à la création du Commercial Times en 1847, du Satirist en 1848 et du Lancet en 1849, mais on suppose que ces journaux ne furent jamais publiés ou qu’ils ne firent paraître qu’un seul numéro. Au cours des années 1840, Hill était le principal chroniqueur parlementaire de la province. On lui a souvent attribué les comptes rendus des débats de la chambre d’Assemblée publiés dans des journaux autres que le Loyalist. Pendant cette décennie, des comptes rendus des débats furent souvent publiés sous les noms de Doak et Hill, éditeurs.

Le désir de Hill de lancer d’autres publications l’amena pour un certain temps à Boston où, en 1851, il forma le projet de créer une revue mensuelle consacrée aux provinces Maritimes. Cette publication devait porter le nom de British American Review, mais il n’existe aucun document qui prouve qu’elle ait déjà été publiée. En 1852, le Loyalist cessa de paraître. Deux ans après, Hill lança un journal bihebdomadaire, l’United Empire, qui vécut quatre mois et qui préconisait une fédération impériale. Hill fut, le reste de sa vie, membre du comité de rédaction du Head Quarters de Fredericton.

En 1845, Hill avait écrit une pièce de théâtre intitulée Provincial Association : or, taxing each other. Présentée comme une tragi-comédie, cette pièce empruntait son sujet à la Provincial Association créée depuis peu pour combattre la politique du gouvernement en matière de libre-échange. La première devait avoir lieu le 31 mars à Saint-Jean, mais les partisans de l’association empêchèrent cette représentation. En fait, la pièce fut interrompue plusieurs fois avant qu’elle ne soit jouée au complet. Lorsqu’elle le fut, elle souleva une controverse qui trouva son écho dans les journaux. Hill publia sa tragi-comédie, mais il n’en existe plus un seul exemplaire.

Pendant qu’il était à Fredericton, Hill compila deux ouvrages. Le premier, en 1845, était intitulé The constitutional lyrist, a collection of national songs, original and selected, adapted to the use of the loyalists of New Brunswick ; et le second, publié cinq ans plus tard et dont il existe encore un exemplaire, avait comme titre A book of Orange songs. Bien qu’il ait été actif au sein de l’ordre d’Orange – il avait été membre fondateur de la grande loge provinciale en 1844 –, le bruit courut que Hill avait épousé à la fin des années 1840 la fille de Jane et de John McDowal, aubergistes de religion catholique, et qu’il s’était peut-être, par le fait même, rendu coupable de bigamie.

Thomas Hill vécut à une période de l’histoire du Nouveau-Brunswick marquée par de nombreuses controverses, période pendant laquelle il alimenta souvent les discordes par ses éditoriaux et ses écrits. Hill était un écrivain talentueux et il savait exposer avec compétence ses opinions bien arrêtées ; la plupart de ses écrits ont malheureusement été perdus. Il avait, selon les paroles de William Godsoe MacFarlane, manifesté « un tempérament ardent qui, parfois, flamboyait en brillants éclairs de génie et qui, d’autres fois, se consumait dans le feu dévorant de la débauche ». Hill mourut à Fredericton en octobre 1860 et fut inhumé dans la fosse commune.

Eric L. Swanick

Thomas Hill est l’auteur de deux poèmes qui ont été publiés dans des journaux du Nouveau-Brunswick. Il fit paraître anonymement The bluenose boys dans son Loyalist and Conservative Advocate (Fredericton), le 18 juill. 1844, mais il signa The emigrant’s Christmas song publié dans le New-Brunswick Courier, le 26 déc. 1844. S’il n’existe plus d’exemplaire de sa pièce de théâtre, Provincial Association : or, taxing each other, qui parut sous forme de brochure à Fredericton en 1845, on trouve toutefois des exemplaires des deux recueils de chansons qu’il compila sous les titres de A book of Orange songs (Fredericton, [1850]) et The constitutional lyrist, a collection of national songs, original and selected, adapted to the use of the loyalists of New Brunswick (Fredericton, 1845). Ces trois ouvrages sont cités dans W. G. MacFarlane, New Brunswick bibliography : the books and writers of the province(Saint-Jean, N.-B., 1895).

Cependant, il est possible de retracer presque complètement l’histoire de son principal journal, le Loyalist, car bon nombre de numéros de cet hebdomadaire ont survécu. Publié à Saint-Jean de mai 1842 à mai 1843, puis à Fredericton de 1844 à 1845 sous le titre de Loyalist and Conservative Advocate, le journal reprenait le nom de Loyalist vers 1846. Après un arrêt momentané, il réapparaissait à Saint-Jean en 1848. Au moment de sa disparition, en 1842, il était devenu le Loyalist and Protestant Vindicator. Hill lança d’autres journaux et des périodiques qui bien souvent restèrent à l’état de projet ou ne connurent qu’un numéro. On en trouve la liste, dans J. R. Harper, Historical directory of New Brunswick newspapers and periodicals (Fredericton, 1961). Le Head Quarters de Fredericton est le seul dont on ait conservé des exemplaires.

N.B. Hist. Soc. (Saint-Jean), N.B. Hist. Soc. papers, J. E. Sereisky, « The mystery of Thomas Hill » (copie dactylographiée, s.d.).— Hill v. Hogg, [1858] 9 N.B.R. 108.— Hill v. Weldon, [1845] 5 N.B.R. 1.— N.-B., House of Assembly, Journal, 1844 : 103–104, 110 ; app., 231–240.— New Brunswick Reporter and Fredericton Advertiser, 1844–1860.— James Hannay, History of New Brunswick (2 vol., Saint-Jean, 1909), particulièrement 2 : 95–97.— D. K. Hazen, « The development of freedom of speech and freedom of the press in New Brunswick » (copie dactylographiée, s.d. ; autrefois au Musée du N.-B., retiré depuis).— MacNutt, New Brunswick.— M. E. Smith, Too soon the curtain fell : a history of theatre in Saint John, 1789–1900 (Fredericton, 1981).— J. E. Veer, « The public life of Lemuel Allan Wilmot » (thèse de m.a., Univ. of N.B., Fredericton, 1970).— Edward Mullaly, « Thomas, we hardly knew ye [...] », Assoc. for Canadian Theatre Hist., Newsletter (London, Ontario), 6 (1982–1983), no 1 : 17–18.

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Eric L. Swanick, « HILL, THOMAS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 23 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/hill_thomas_8F.html.

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Auteur de l'article:    Eric L. Swanick
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1985
Année de la révision:    1985
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