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GORE, WILLIAM, ingénieur civil et inventeur, né le 13 avril 1871 à West Winch, près de King’s Lynn, Angleterre, fils de John Gore, berger, et de Mary Ann Barrett ; le 2 janvier 1899, il épousa à King’s Lynn Katherine (Katie, Kate) Daisley (décédée le 6 décembre 1949), et ils eurent un fils ; décédé le 7 juin 1934 à Long Branch (Toronto).
Né dans les Fens, basses terres de l’est de l’Angleterre, William Gore grandit dans un paysage parsemé d’ouvrages hydrauliques. Après avoir fréquenté la King’s Lynn Technical School, il devint apprenti, puis ingénieur adjoint à la fonderie Highgate Iron Works, dans la même ville. Il s’installa ensuite à Londres pour suivre le cours de génie civil et mécanique du City and Guilds of London Institute for the Advancement of Technical Education. Il obtint son diplôme en 1896.
Grâce à des études brillantes, Gore trouva du travail auprès des meilleurs ingénieurs hydrauliques de Grande-Bretagne. À titre d’adjoint principal de George Frederick Deacon, puis au sein de la firme Sir Alexander Binnie, Son and Deacon de 1899 à 1912, il avait la « responsabilité directe », selon ses dires, de travaux en Angleterre, au pays de Galles, en Italie, en Australie, en Grèce, à Malte, en Russie et en Inde. Parmi ses projets figuraient des réservoirs, des aqueducs, des barrages, des pipelines, des lits filtrants, des égouts, des canaux d’irrigation, des stations de pompage, des puits et des chemins de fer souterrains.
En 1912, deux ans après son invention de la filtration à sable mouvant, Gore se joignit à la Ransome-ver Mehr Machinery Company de Londres dans le but de développer cette technologie. L’entreprise créa une filiale, la John ver Mehr Engineering Company Limited, afin d’explorer les marchés étrangers et de répondre à la demande croissante de purification d’eau pour promouvoir la santé publique. Au début de 1913, à Toronto, Gore et John Malan ver Mehr présentèrent le nouveau filtre à Roland Caldwell Harris*, commissaire des travaux publics de la ville. Insatisfait de la capacité et du rendement de l’usine de filtration lente sur sable terminée en 1912 sur l’île Centre, Harris préconisait fortement l’adoption d’une méthode de traitement de l’eau plus efficace.
Les essais que réalisa George Gallie Nasmith*, à la tête des laboratoires du département de santé de Toronto [V. Charles John Colwell Orr Hastings], confirmèrent la performance de l’invention de Gore et, en 1914, la municipalité, sous la direction du maire Horatio Clarence Hocken, accorda à la compagnie de ver Mehr un contrat de 1,1 million de dollars pour construire une usine de filtration à sable mouvant sur l’île Centre. La firme suscita l’attention et attira des gens talentueux. À ce moment-là, elle avait engagé comme ingénieur en chef William Storrie, auparavant responsable des travaux hydrauliques à Ottawa. Audacieux, le projet de filtration serait le plus gros et le plus coûteux au Canada, et constituerait la plus importante application de la technologie de filtration à sable mouvant au monde. La presse d’ingénierie nord-américaine suivit donc attentivement son déroulement. L’usine, partiellement en service en décembre 1917, mais terminée l’année d’après, permit enfin aux Torontois de jouir d’un approvisionnement d’eau potable sécuritaire. Au cours de ces années, Gore et sa femme décidèrent de rester au Canada.
Entre 1913 et 1921, Gore obtint cinq brevets canadiens, fruits de son « esprit de type inventif », comme le décrivait Storrie. Tous concernaient le traitement de l’eau ou de l’eau des égouts. En 1915, Gore adapta son filtre pour l’utilisation en temps de guerre ; les armées britannique, française et américaine l’employèrent subséquemment. Gore et Storrie conçurent également pour la compagnie de ver Mehr de petites unités de filtration destinées à des immeubles de bureaux à Toronto et Montréal. En 1919, Gore construisit des usines de filtration à sable mouvant à Brampton, Oshawa et Rockland, en Ontario, tandis que Storrie s’occupait de projets de ver Mehr en Grande-Bretagne. En octobre 1919 naquit une nouvelle association, la Gore, Nasmith and Storrie, qui offrait, selon le Canadian Engineer, des services-conseils sur « toutes formes de génie de santé publique, notamment les travaux hydrauliques, les égouts, l’évacuation des eaux usées et la recherche bactériologique ». En principe active partout au Canada, la firme réalisa cependant tous ses projets mentionnés dans la presse d’ingénierie en Ontario, sauf un.
Pour ses clients municipaux, la Gore, Nasmith and Storrie rédigeait d’abord un rapport sur les solutions possibles à un problème sanitaire particulier. Une fois le projet approuvé, elle concevait souvent les installations, en supervisait la construction, puis en assurait le fonctionnement pendant une certaine période. Elle réalisa ses plus importants ouvrages d’approvisionnement en eau à Hamilton, Windsor, Toronto, Belleville, Ottawa, St Thomas et Calgary, et ses plus grands travaux d’égouts à Toronto, dans le canton d’York et à Kitchener. La compagnie effectuait également de nombreuses consultations dans toute la province. Ayant déjà gagné la confiance de Harris, la Gore, Nasmith and Storrie obtint ses plus gros contrats à Toronto. Le commissaire aux travaux publics s’en remettrait exclusivement aux conseils de la firme en matière d’approvisionnement en eau et de l’évacuation des eaux usées jusqu’à sa mort en 1945.
La Toronto Water Works Extension constitua le projet le plus remarquable de la compagnie. Harris proposait de sécuriser l’approvisionnement en eau de la ville en dupliquant les principaux éléments d’approvisionnement, de distribution et d’entreposage du système existant. En 1925, il engagea Gore et Henry Girdlestone Acres* pour en réaliser les plans. Le projet de 14,3 millions de dollars – le plus imposant système de purification et de distribution d’eau courante au pays à l’époque – comprenait une usine de filtration rapide sur sable, qui utiliserait une nouvelle technologie de brassage en spirale inventée par Gore, un réservoir, deux stations de pompage et un tunnel d’eau filtrée de 9,5 milles. À la mort de Gore, on avait achevé le réservoir et le tunnel seulement ; l’installation de filtration, plus tard nommée la R. C. Harris Water Treatment Plant, n’entra entièrement en service qu’en 1941.
La Gore, Nasmith and Storrie contribua aussi à résoudre les problèmes de traitement des eaux usées de Toronto. Le projet de traitement des eaux usées de North Toronto, achevé en 1929 et présenté comme « le plus grand système complet jamais réalisé en une fois au Canada », reliait 13,5 milles d’égouts principaux à une usine de traitement d’une valeur de un million de dollars. Initialement conçue pour répondre aux besoins de 50 000 habitants, l’usine comprenait un ensemble unique d’éléments, dont des bassins de sédimentation primaire et secondaire, des cuves de digestion chauffées et des lits de séchage de boue couverts de verre ; en Ontario, jamais, jusque-là, on n’avait tenté d’utiliser la chaleur pour accélérer la digestion. L’agrandissement de l’ouvrage que la Gore, Nasmith and Storrie termina en 1935 desservirait 100 000 personnes. Cependant, l’usine de North Toronto ne traitait qu’un dixième des égouts de la ville. Le reste s’en allait dans le lac Ontario pratiquement sans traitement (la station d’évacuation des eaux usées de la baie d’Ashbridges, mise en marche en 1914, retirait les boues, mais ne traitait pas les effluents). Harris espérait remédier à cette situation quand il retint à nouveau les services de la firme de Gore en 1931. Le conseil municipal écarta le plan de 20,4 millions de dollars proposé deux ans plus tard pour une installation de traitement primaire et secondaire à l’embouchure du ruisseau Highland, à Scarborough (Toronto). D’autres études et tergiversations politiques suivirent. Finalement, la construction d’une plus grande usine de traitement primaire démarra à la baie d’Ashbridges en 1944.
Le seul ouvrage que la Gore, Nasmith and Storrie effectua à l’extérieur de l’Ontario – et le plus ambitieux projet que l’entreprise réalisa du vivant de Gore – fut un nouveau système d’approvisionnement en eau pour Calgary. En 1929, alors que la ville faisait face à une pénurie d’eau, Gore constata la désuétude du système existant. Afin de remédier au problème, il proposa l’achat de 2 400 acres de terrain le long de la rivière Elbow dans le but de construire un barrage, un réservoir, une station de pompage alimentée par des turbines hydrauliques, une usine de filtration rapide sur sable et 8,5 milles de conduites principales d’eau. En 1933, les habitants de Calgary acquirent ainsi un approvisionnement abondant d’eau potable de qualité, une protection contre les inondations et un important espace récréatif. L’accès à l’eau d’irrigation permit, comme le notèrent des responsables municipaux, de créer « de magnifiques jardins, de beaux parcs et des boulevards soignés » partout dans la ville.
Au début de 1934, la maladie empêcha William Gore de présenter comme prévu une communication majeure sur le projet de Calgary. Il ne vécut pas assez longtemps pour voir l’intérêt sans précédent que suscita le Glenmore Water Works System. Cela valait peut-être mieux, car Gore, selon ce qu’on écrivit dans le Toronto Daily Star après sa mort, « était aussi timide que compétent ». « [P]eu connu en dehors de sa profession », continuait-on, il était toutefois « estimé dans le monde de l’ingénierie comme un de ses hommes les plus brillants ». Beaucoup de journaux d’ingénierie au Canada et aux États-Unis soulignèrent son décès dans des nécrologies détaillées. Même le New York Times reconnut en Gore « un ingénieur et un inventeur de réputation internationale » ; le rôle qu’il avait joué en utilisant la technologie pour améliorer la santé et le bien-être des Canadiens passa néanmoins inaperçu.
William Gore est l’auteur ou le coauteur des publications suivantes : « The Toronto drifting sand water purification plant », Engineering Instit. of Canada, Journal (Montréal), 2 (1919) : 701–713 (avec William Storrie) ; « Purification of sewage – sludge digestion », Canadian Engineer (Toronto), 48 (janvier–juin 1925) : 579–581 (avec G. G. Nasmith) ; « The Border Cities’ new filter plant », Contract Record and Engineering Rev. (Toronto), 3 mars 1926 : 202–206 (avec J. C. Keith) ; City of Toronto report on proposed extensions to the water works system, May 15th, 1926 ([Toronto, 1926]) (avec H. G. Acres) ; « Supply, intakes and storage », American Water Works Assoc., Journal (Baltimore, Md), 15 (janvier–juin 1926) : 531–545 ; « Fourteen million dollar extension to Toronto’s water supply system », Contract Record and Engineering Rev., 19 juin 1929 : 726–730 ; « Ottawa’s water purification problems », Contract Record and Engineering Rev., 19 mars 1930 : 343–345 ; « Modern water works pumping stations », Canadian Engineer, 22 mars 1932 : 5–8 ; « A $4,000,000 water supply system for the city of Calgary : part 1 – the dam, reservoir, screen house and pumping plant », Engineering and Contract Record (Toronto), 48 (1934) : 359–368 ; et « Calgary’s new water works system », American Water Works Assoc., Journal, 26 (1934) : 977–1014. Le DBC conserve une liste complète de ses articles parus dans les périodiques mentionnés ci-dessus, ainsi que dans American Soc. of Civil Engineers, Proc. (New York), Engineering News (New York) et Instit. of Civil Engineers, Minutes of proc. (Londres).
BAC, R3492-0-5, vol. 91, membership file for William Gore.— GRO, Reg. of marriages, King’s Lynn, Norfolk, 2 janv. 1899.— New York Times, 8 juin 1934 : 21.— Toronto Daily Star, 8 juin 1934 : 4.— Letty Anderson, « l’Approvisionnement en eau », dans Bâtir un pays : histoire des travaux publics au Canada, Gérard Boulad et al., trad., sous la dir. de N. R. Ball (Montréal, 1988), 209–235.— M. N. Baker, « Highlights reflecting Canadian waterworks practice », Engineering News-Record (New York), 5 juin 1941 : 77.— A. E. Berry, « Developments in Canadian waterworks practice, 1850–1940 », Water and Sewage (Toronto), 78 (1940), no 12 : 9–18, 42–45.— Tom Davey, Recollections of water pollution control in Ontario (Aurora, Ontario, 1985).— Office de la propriété intellectuelle du Canada, « Base de données sur les brevets canadiens », brevets nos 146827, 148307, 159657, 176682, 213108 : www.ic.gc.ca/opic-cipo/cpd/fra/introduction.html (consulté le 6 juin 2017).— William Storrie, « William Gore, M. Am. Soc. C. E. », American Soc. of Civil Engineers, Trans. (New York), 100 (1935) : 1660–1662.
Wayne Reeves, « GORE, WILLIAM », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 20 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/gore_william_16F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/gore_william_16F.html |
Auteur de l'article: | Wayne Reeves |
Titre de l'article: | GORE, WILLIAM |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2022 |
Année de la révision: | 2022 |
Date de consultation: | 20 nov. 2024 |