DCB/DBC Mobile beta
+

Dans le cadre de l’accord de financement entre le Dictionnaire biographique du Canada et le Musée canadien de l’histoire, nous vous invitons à participer à un court sondage.

Je veux participer maintenant.

Je participerai plus tard.

Je ne veux pas participer.

J’ai déjà répondu au sondage

Nouvelles du DBC/DCB

Nouvelles biographies

Biographies modifiées

Biographie du jour

La Confédération

Le gouvernement responsable

Sir John Alexander Macdonald

De la colonie de la Rivière-Rouge au Manitoba (1812–1870)

Sir Wilfrid Laurier

Sir George-Étienne Cartier

Sports et sportifs

Les fenians

Les femmes dans le DBC/DCB

Les conférences de Charlottetown et de Québec en 1864

Les textes introductifs du DBC/DCB

Les Acadiens

Module éducatif

La guerre de 1812

Les premiers ministres du Canada en temps de guerre

La Première Guerre mondiale

GUYON, LOUISE (Thibault ; Damours de Freneuse), baptisée à l’île d’Orléans le 1er mai 1668, fille de Simon Guyon et de Louise Racine, décédée après 1711.

Louise Guyon perdit jeune ses parents et épousa en premières noces, à Château-Richer, le 10 avril 1684, Charles Thibault. Veuve après 17 mois de mariage, elle convolait, à Québec le 1er octobre 1686, avec Mathieu Damours* de Freneuse ; en même temps, sa sœur aînée, Marguerite, épousait Louis Damours* de Chauffours, frère de Mathieu. Le mariage de Louise l’introduisait dans l’une des premières familles du pays : le père, Mathieu Damours* de Chauffours, était conseiller au Conseil souverain, et quatre des fils possédaient des seigneuries en Acadie. Mathieu, le mari de Louise Guyon, avait pour sa part obtenu deux lieues de terre sur la rivière Saint-Jean, entre Jemseg et Naxouat (Nashwaak). Les deux époux allèrent s’y installer dès 1686 et, pendant dix ans, ils s’occupèrent de la mise en valeur de leur domaine. Le recensement de 1695 signale qu’ils possèdent 30 arpents de terre en culture ainsi qu’un troupeau d’élevage et qu’ils récoltent 200 minots de grain. Ils font également la traite des fourrures avec les Indiens.

En 1696, Mathieu Damours se rendit à Québec pour y remplacer au Conseil souverain son père décédé l’année précédente. Se proposant de s’établir dans la capitale, il loua sa seigneurie et retourna chercher sa femme et ses cinq enfants, mais il mourut avant son retour à Québec. Mme Damours de Freneuse demeura encore quelques années à la rivière Saint-Jean, essayant de rétablir sa fortune. Un ordre du roi accorda la charge qu’avait occupée son mari au Conseil souverain au sieur Denis Riverin*, à condition que celui-ci verse 1 000# à la famille.

En 1700 le siège du gouvernement de l’Acadie fut transporté à Port-Royal (Annapolis Royal, N.-É.) et le fort Saint-Joseph (Naxouat) où résidait le gouverneur Joseph Robinau* de Villebon fut démoli. Ses habitants étant demeurés sans défense émigrèrent à Port-Royal ; Mme de Freneuse alla s’y établir vers 1702 avec sa sœur et son beau-frère Louis Damours de Chauffours. Le nouveau gouverneur, Jacques-François de Monbeton* de Brouillan, et les officiers accueillirent avec sympathie cette jeune veuve de 34 ans, mère de cinq enfants, et reçurent dans la garnison ses trois fils aînés, dont l’âge variait entre 10 et 15 ans. Simon-Pierre Denys* de Bonaventure, lieutenant de roi, poussa la courtoisie jusqu’à l’héberger chez lui, en attendant qu’elle acquît une maison non loin du fort. M. de Bonaventure dépassa sans doute un peu trop les bornes de la galanterie puisque, l’année suivante, naissait un enfant prénommé Antoine, dont le baptême, célébré le 6 novembre 1703, figure aux registres de Port-Royal. Dès lors, cette liaison alimente la chronique de Port-Royal et prend, dans la correspondance officielle, les dimensions d’une affaire d’État. Le lieutenant général civil et criminel en Acadie, Mathieu de Goutin*, ainsi que les missionnaires Félix Pain et Patrice René dénoncent le scandale. L’évêque de Québec, Mgr de Saint-Vallier [La Croix*], demande d’éloigner cette femme et Pontchartrain, ministre de la Marine, donne ordre de l’envoyer au Canada ou à la rivière Saint-Jean. Mais Bonaventure se défend comme un diable ; il proteste que la charité seule a dicté sa conduite, réclame une enquête et, dans un mouvement chevaleresque, offre de partir lui-même plutôt que d’exiler cette malheureuse femme qui, en plus de ses enfants, vient de recueillir deux nièces orphelines. Brouillan, le gouverneur, prend aussi la défense de Mme de Freneuse et se contente de l’éloigner temporairement de Port-Royal.

Sur les entrefaites, Brouillan meurt en septembre 1705 et Bonaventure assume l’intérim, en attendant de devenir gouverneur en titre – du moins il convoite ardemment le poste. Mme de Freneuse, probablement pour ne pas nuire à cet avancement, part pour La Rochelle. Mais le 22 mai 1706 la cour nomme Daniel d’Auger* de Subercase gouverneur, et le ministre déclare nettement à Bonaventure que le scandale qu’il a causé a empêché le roi de le nommer. Sa vertueuse Majesté peut bien entretenir des maîtresses, mais ne les tolère pas chez ses officiers.

Mme de Freneuse revient à Port-Royal et une nouvelle tempête se déchaîne, mais cette fois-ci ce sont des victimes des violences de Bonaventure qui se plaignent de lui. Malgré les ordres du ministre, Subercase temporise et se contente d’éloigner la belle vers le haut de la rivière Dauphin (Annapolis). L’épouse légitime de Bonaventure, Jeanne Jannière, après plusieurs atermoiements, finit par venir s’installer en Acadie en 1707. Il s’ensuit une accalmie temporaire mais les amoureux continuent de se voir. De Goutin continue d’envoyer ses dépêches à la cour, l’évêque de Québec revient à la charge et le père René passe en France pour se plaindre au ministre. Celui-ci, apprenant qu’on ne lui a pas encore obéi, se fâche : il blâme Subercase, lui adressant un ordre formel du roi d’éloigner Mme de Freneuse, et déclare à Bonaventure que si, au retour des vaisseaux, elle n’est pas partie, il sera cassé et déchu de son emploi. Subercase obtempère et Mme de Freneuse part pour Québec à l’été de 1708, sous la conduite de Charles-Joseph Amiot* de Vincelotte. Après la capitulation de Port-Royal en 1710, Bonaventure retourne en France, où il meurt à Rochefort en 1711.

En cette même année, Mme de Freneuse revenait à Port-Royal (rebaptisé Annapolis Royal), avec un laissez-passer de Philippe de Rigaud* de Vaudreuil, gouverneur la Nouvelle-France. Elle traversa la baie Française (baie de Fundy) en canot, au cœur de l’hiver, seule avec son plus jeune fils et un Indien. Le gouverneur anglais intérimaire d’Annapolis Royal, sir Charles Hobby*, lui permit d’y demeurer, mais Paul Mascarene prétendit qu’elle servait d’espion au gouvernement français. En fait, Mme de Freneuse aurait eu plusieurs raisons valables de revenir en Acadie, ne fût-ce qu’à cause des nombreux parents qu’elle y avait et pour voir aux biens qu’elle avait dû abandonner hâtivement à la rivière Saint-Jean et à Annapolis Royal. Par ailleurs, on sait que la cour de France songeait sérieusement à reprendre Annapolis Royal. Déjà à Rochefort, Denys de Bonaventure avait dressé un plan précis dans ce but, et il se peut que Mme de Freneuse ait collaboré à ce projet en fournissant à Vaudreuil des renseignements sur les forces anglaises à Annapolis Royal. D’après Mascarene, deux de ses fils auraient participé en juin 1711 à l’attaque de Bloody Creek (près de Bridgetown, N.-É.), où périrent 30 soldats anglais. Après quoi ils seraient revenus à Annapolis Royal pour conduire leur mère en sûreté.

Par la suite, on perd la trace de Mme de Freneuse. Elle dut vivre quelque temps à Québec, puis repasser en France, car on trouve quelques-uns de ses enfants établis à La Rochelle en 1727 ; deux de ses fils firent carrière dans la marine. Une romancière américaine a fabriqué sur Mme de Freneuse un roman discutable. Quel besoin y a-t-il d’ajouter des épisodes imaginaires à la vie ardente et courageuse de cette femme, héroïne d’un roman vécu, rempli d’aventures et de passions ?

René Baudry

AN, Col., B, 15, f.69 ; 20, f.80v. ; 23–33 ; Col., C11A, 29 ; Col., C11D, 4–6 ; 7, ff.100ss. ; Section Outre-Mer, G1, 466, pièces 10, 17, 20, 22, 24 (recensements de l’Acadie).— Correspondance de Vaudreuil, RAPQ, 1939–1940, 427.— Archange Godbout et R.-J. Auger, Familles venues de La Rochelle en Canada, RANQ, 1970, 193, 206.— Jug. et délib., III : 436 ; IV : 43.— J. C. Webster, Acadia at the end of the seventeenth century : letters, journals and memoirs of Joseph Robineau de Villebon, commandant in Acadia, 1690–1700, and other contemporary documents (« N. B. Museum, Monographie ser. », I, Saint-Jean, N.-B., 1934).— Tanguay, Dictionnaire, I : 294, 565.— E. S. M. Eaton, Quietly my captain waits (New York, Londres, 1940).— Murdoch, History of Nova-Scotia, I : 268, 302.— W. O. Raymond, Glimpses of the past ; history of the River StJohn, A.D. 1604–1784 (Saint-Jean, N.-B., 1905), 73s.— Pierre Daviault, Mme de Freneuse et M. de Bonaventure, MSRC, 3e sér., XXXV (1941), sect. : 37–56.— W. F. Ganong, Lease of the seignory of Freneuse on the St. John in 1696, Acadiensis ([Saint-Jean, N.-B.]), I (1901) : 121–125.— P.-G. Roy, Mathieu Damours de Chauffours, Les petites choses de notre histoire (7 sér., Lévis, Québec, 1919–1944), 6e sér., 68–78 ; Mathieu Damours de Freneuse, BRH, XXXII (1926) : 577–582.

Bibliographie générale

Comment écrire la référence bibliographique de cette biographie

René Baudry, « GUYON, LOUISE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 29 mars 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/guyon_louise_3F.html.

Information à utiliser pour d'autres types de référence bibliographique


Permalien: http://www.biographi.ca/fr/bio/guyon_louise_3F.html
Auteur de l'article:    René Baudry
Titre de l'article:    GUYON, LOUISE
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1974
Année de la révision:    1974
Date de consultation:    29 mars 2024